--- 1987 / 2016 ---
« Allez au-delà des formes, certes… mais en passant par les formes. »
Swâmi Prajñãnpad
« Ne cherchez rien avant, tout commence, à chaque fois, à cet endroit-ci et là, et à ce moment ça se met à tourbillonner. »
Frédéric Neyrat
« J’ai joué dans ce palais des formes infinies et là j’ai aperçu celui qui est sans formes. »
Rabindranath Tagore
« Il n'y a pas de mystère. »
Chögyam Trungpa
« Non seulement jouir du cosmos, mais aussi se dresser face à lui… »
Kenneth White
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ATLAS (97 phénomènes…)
1987 / 2016
Compositions de musique concrète de Lionel Marchetti
pour une écoute acousmatique d'une durée de 12heures…
7 CERCLES sous forme de labyrinthe sonore
Composition musicale, production, conception et réalisation sonore, tournages sonores, instrumentarium, dans les studios du compositeur : Lionel Marchetti – 1987/2016
Robots : Virginia & Robinson
(IUSS <Centaures Technologies> - 2006)
Textes des robots : Frédéric Neyrat
et textes de Frédéric Neyrat lus par lui-même
7 Cercles
97 compositions
durée totale : 12 heures
ATLAS (97 phénomènes…) :
Premier Cercle : COSMOS (HORIZON DES OBJETS)
Second Cercle : UN CHAOS CALCULABLE
Troisième Cercle : LES REPLIS DU TEMPS
Quatrième Cercle : L'ANIMAL ÉVENTRÉ
Cinquième Cercle : LA GUERRE (EXCROISSANCE DU CERCLE)
Sixième Cercle : LE SON DU DÉSERT
Septième Cercle : CHANT DE LA GUÉRISON
Envois 1 & 2
Final : OCÉAN (DE LA FERTILITÉ)…
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download >---< ORIGINAL MASTER (stéréo) 2016 - 48khz/24bits
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Frédéric Neyrat :
atoposophie.wordpress.com
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À propos de ATLAS (97 phénomènes…) :
« Dragon gigantesque dont on ne perçoit ni la tête ni la queue, ATLAS (97 phénomènes...) est un recueil qui lentement se déplie en suivant un parcours en méandres au travers de plusieurs dizaines de compositions concrètes.
Multipliant les poétiques, les factures, les styles, les époques, les origines (expérimentations sur l'art du son enregistré, improvisations reformulées pour l'écoute acousmatique, musiques pour la création radiophonique, le cinéma, l'installation, le théâtre et autres compositions électroacoustiques inédites) l'ensemble est mis en son dans un grand geste final, à la façon d'un labyrinthe sonore monumental où il est offert à l'auditeur de se perdre, définitivement... voire, pour celui ou celle qui en ressortira - éventuellement transformé - de se retrouver face à face avec ce qui, au travers du voile de la multipicité, ne saura jamais être nommé.
En chantier depuis de nombreuses années, surgissant, à mon insu, de la fouille méticuleuse de mes archives musicales analogiques et numériques afin, petit à petit, d'exhumer (de faire ressortir) plus qu'un nombre - morceaux épars pris au filet de la forge du grand travail sur presque trente années : objets, entités, personnages, fictions d'espaces, roches, vents, eau et feu, souffle, voix, couleurs, goûts, cris, corps, matières nombreuses chargées de leurs poétiques et factures d'alors et à venir, parfois divergentes et laissées en jachère dans les cartons de l'atelier des sons…
...le tout lentement organisé et aujourd'hui proposé d'une traite, en un immense rouleau qui n'est pas sans faire penser à celui du calligraphe : déploiement horizontal destiné à la vision cavalière afin de survoler l'entier d'un territoire.
Un nombre, au sens, également, de la recherche d'une unité.
Car il s'agit, désormais, avec l'agencement et la composition de ces multiples phénomènes, de laisser surgir, de laisser remonter une ligne de force - une veine, à l'allure géomorphologique - et précisément, ce sont des époques, des structures, des matières et des élans diversement façonnés, parfois hétéroclites, qui tous ont été mis au défis d'une coexistence : dans le même essor, en une longue dérive, pour un épanouissement, "comme une tour qui pousserait de sa propre substance" (Roberto Juarroz).
Création d'un vaste complexe, donc, au sens plein du mot, c'est à dire offrant cette possibilité, pour l'auditeur, qu'une force naturelle fraye en ces parages, et ce, afin qu'il la ressente - pleinement.
S'agit-il d'un piège ?
S'agit-il d'un filet lançé dans un océan de sons ?
Qu'allons nous, ici, à l'écoute, saisir, découvrir ou comprendre ?
Sera-t-il possible d'en revenir ?
S'agit-il d'un espace clos ou d'un espace ouvert ?
N'y a-t-il pas là, plutôt, un cheminement, auquel il faudrait, ici et là, et selon une mesure propre à chacun, accorder sa respiration, pour au final s'en échapper et enfin retrouver une existence singulière ?
L'enjeu, pour moi, avec autant de matière en main, a donc été de jouer avec l'alternance de compositions concrètes très serrées dans leur écriture, mélangeant des poétiques parfois éloignées, à l'allure aphoristique, parfois solidement repliées sur elles-mêmes et qui ont dû trouver leur souffle en se confrontant (en répondant) à des vues absolument autres, étirées, plastiques, grandes, lisses, tout en jonglant au travers de différents styles au sein même du genre musical concret : fieldrecordings, sons du mondes, animalités, anecdotiques, abstractions, jeux avec le fantastique, phénomènes sonores captés, petits théâtres de sons, fictions acousmatiques (le plus souvent) ou encore captations à l'allure de documentaire…
Nous évoluerons, par exemple, de la mise en son du journal d'un voyageur de l'espace à la découverte acoustique de lieux plus ou moins objectivement observés (un camping au Japon sous le Mont Fuji, une place nocturne en Italie, un torrent dans les Alpes, un lac en Chine, un enregistrement des vagues de l'océan Pacifique...) tout comme au travers de la réalité crue de phénomènes sonores captés et retravaillés en tant que tels, au plus proche de la matérialité de la membrane haut-parlante, afin d'obtenir, finalement, une saveur synthétique proprement physique ; nous nous retrouverons abandonnés à de nombreuses fictions tant microscopique que macroscopique, à la limite de l'abstrait et du concret, bousculant et jouant, sciemment, de toutes les échelles, des espaces internes propre à l'écriture haut- parlante, de la présence ou non de personnages vocaux et de leurs avatars, le tout dérivant lentement et longuement au sein du déploiement, en une rose des vents, de multiples cartographies paradoxales, pliées, dépliées, repliées… comme sait nous l'offrir la manipulation infinie des sons enregistrés.
Un croisement d'ondes et de poétiques, le tout associé à une idée de l'étude musicale.
Nous serons également accompagnés, tout au long de l'œuvre, par un improbable couple sonore enregistré : deux robots machines vocoïdes (Robinson & Virginia) - les textes, en anglais, sont écrits par le philosophe Frédéric Neyrat - dont les questions, les remarques, l'intime relation, les points de vues dirigeront notre écoute et seront la signature d'un grand voyage : du monde de l'humain, à la fois acteur et observateur, en passant par la machine (intelligente ?) jusqu'au Cosmos.
Dans le même élan, l'ensemble des compositions, organisées en sept Cercles, sera souligné, ici et là, par quelques pensées originales (enregistrées et mises en son) du même philosophe Frédéric Neyrat qui - depuis sa vue d'aigle, depuis son trajet d'astre errant, en tant que personnage off - apparaîtra de temps à autre dans le ciel cosmologique de l'œuvre pour nous ouvrir à sa dimension symbolique, métaphorique et métaphysique tout à la fois, à moins que ce ne soit pour nous ramener, par une voie foncièrement autre, après tours et détours, à l'essence énigmatique des choses qui peuplent l'univers. »
Lionel Marchetti - 2016
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À propos de ATLAS (97 PHÉNOMÈNES…) par Michèle Tosi (in ResMusica, septembre 2017) ; lors de la création de la version intégrale sur Acousmonium Motus au Festival Futura 2017 par Nathanaëlle Raboisson, Olivier Lamarche, Eric Broitmann, Paul Ramage, Guillaume Contré et le compositeur :
« Une œuvre monde —
L’idée de donner Atlas (97 phénomènes) en continu a traversé l’esprit du compositeur qui a travaillé durant quelques dix années à cette entreprise démiurgique, sans contrainte ni limitation d’aucune sorte, avec, au cœur du projet, l’utopie d’embrasser tous les sons du monde.
Il s’agissait pour Lionel Marchetti de réunir la somme des matériaux stockés dans ses archives — échantillons, bribes, objets sonores épars — dont il n’avait jamais tiré parti, et d’en réaliser un montage sans souci de forme a priori. Nait alors l’idée du recueil (d’un atlas) et ses différents chapitres (sept « cercles » et 97 phénomènes) auxquels le compositeur va donner des titres, imaginant, au-delà de cette classification et à la faveur de quelques transitions, une sorte de scénario : le journal d’un voyageur dans l’espace (Cercles I et II) qui revient sur terre et appréhende le monde physique (forêts, déserts, océans, nuages, rivières, montagnes…), amorçant même une réflexion métaphysique (lecture du Livre de Job).
Trois voix diversement traitées guident notre écoute et créent du lien dans ce cheminement initiatique : celle du professeur – le philosophe Frédéric Neyrat – et de deux robots s’exprimant en anglais.
Une dizaine d’interprètes – y compris le compositeur – se relaient à la console de projection pour mettre en espace, via l’orchestre de haut-parleurs (acousmonium Motus), cette oeuvre monde dans laquelle on se laisse immerger : « un croisement d’ondes et de poétiques, le tout associé à l’idée de l’étude musicale » précise très justement le compositeur. »
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ATLAS (97 PHÉNOMÈNES…)
« Composition — pure folie
Labyrinthe ouvert
mais aussi enchevêtrements, cheminements sur cheminements, imbroglio
Complexité toujours grandissante des liaisons, des déliaisons, des enchaînement et des rapports
Apparitions, foisonnements, intensités et inventions (une kyrielle d'inventions)
Pérégrinations microphoniques et multiplication des motifs : la réalité est le motif
Fleuve, sources, rivières, forêts, cavernes, montagnes et littoraux
Courbes de la Terre vue d'en haut
Matériologies, reliefs, tout un catalogue de substances, de morphologies et d'ondes
Mais aussi, pourquoi pas, et il faudra en finir définitivement avec cela : cité humaine, électricité, psychologies torves et fictions (multiplication dangereuse et proliférante du petit théâtre mental)
L'exercice du piège
Somme ou recueil ?
Méditation et action
Une voix se manifeste, une incise dans le corps du son
Plusieurs voix, une archéologie de la voix, à moins que ce ne soit la présence du feu
Pour chaque éclat, un mot
et bientôt, qui sait, la venue d'une parole
Un feu qui brûle à cause du bois, brûle seulement s'il y a provision (de combustible), mais il meurt en ce lieu même, s'il n'y a plus de provision, parce qu'alors la condition a changé
Le jeu du monde
L'écoulement
Espace, espacements, circulation de forces dans le corps même de la matière et du temps
Le risque des questions nécessaires
Qu'est-ce qu'un phénomène : l'apparition, la venue observée de ce qui est là, en attente
ou la recherche d'un souffle, d'une circulation entre des émergences désormais en présence ?
Le silence existe-t-il ?
Le flux et le reflux
Étoiles, étoilement, affirmation verticale, ici et là, du vide
Cosmos
Comment est-il possible de combiner autant d'espaces diversement situés ?
Le chemin montant descendant est un et le même
Ne pas se mentir à soi-même
La montagne est immobile
Abandon de tout stratagème
L'épée
Le retour à soi — pour un nouveau départ
L'œil
et
l'oreille
Atlas —
Une suite
labyrinthique
à la facture plus ou moins archaïque
où le local, à chaque tour et détours, se reflète dans le global
amplifiant l’évidence chaotique d’une forme en spirale
L’hélicoïde
déjà là
depuis l’aube et son souffle premier. »
Lionel Marchetti - 2018
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Remerciements / il est possible de croiser, tout au long de l'œuvre, quelques sons, présences, influence et parfois vocalités modifiés de :
John von Neumann (C3-2), Walt Whitman (C1-5), Robinson Jeffers (C6-14), Jérôme Nœtinger (C2-4), Yôko Higashi / Hamayôko (C1-5 ; C3-6 ; C6-1 ; C6-6 ; C6-12), Jean Cocteaux (C1-8), P. P. Pasolini (C5-13), Dominique Répécaud (C1-7 ; C4-5), Bruno Roche, Alex Dressler (C2-5), Pierre Mottron (C2-5 ; C4-9 ; C4-10 ; C6-5), Michel Chion (C7-3, 4 & 5), Pierre Schaeffer (C3-6), Seijiro Murayama (C3-9 ; C3-14 ; C7-1), Bruno Fleurence & 60 étages (C1-7 ; C3-6 ; C6-6), Renaud Golo (C5-1), The Residents, David Chiesa & leUNensemble (C3-10), Giuseppe Ungaretti (C5-13), Denis Boyer (C1-10), Olivier Capparos (C2-5 ; C5-5 ; C5-8), Tino Rossi (C3-6), William Pellier (C3-6), Lama très grand lama (C7-10), Gary Snyder (C2-12), Mooji (C5-7), Charles Olson (C7-4 & 5), a dead man (C3-4), Pierre Jacob (C1-8 ; C3-8), Odile Cortinovis (C5-8), Pierre-Jean Giloux (C5-2), John Cage (C1-9), William Carlos William, Roger de la Frayssenet, Sébastien Églème (C2-9), Emmanuel Hölterbach (C2-12 ; C6-14), Adèle Marchetti, Kyô Marchetti-Higashi (C1-7 ; Envoi 2), Dominique Lechec (C6-14)… &… (A+B)° = N inconnues…