--- 1992 ---
« Je vois, je regarde
J'écoute un instant
Je goûte, je touche, je porte à ma bouche
Je suis le je (associé à des verbes variés)… »
William Pellier
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Mue (la demeure brillante)
Musique concrète de Lionel Marchetti
pour une écoute acousmatique d’une durée de 21’30’’
à Hervé Bocquin
Texte original : William Pellier
Voix : Hervé Bocquin, William Pellier
forets.free.fr/wp/wpmue.html
forets.free.fr/lm/compositions.html
Production, composition musicale, conception et réalisation sonore, tournages sonores, avec l’instrumentarium du CFMI de Lyon :
Lionel Marchetti – 1991/1992 au studio du CFMI de Lyon (Université Lumière Lyon 2) ainsi que des les studios du GMVL de Lyon
Création publique : Le 102 rue d’Alembert (Grenoble, 1993)
– cycle Le bruit de la bande
Création radiophonique sur France Musique en 1994
Une première édition CD de Mue (la demeure brillante) à été réalisée en 1993 pour le label Metamkine, dans la collection Cinéma pour l’oreille, dirigée par Jérôme Noetinger - France
www.corticalart.com
Remerciements : Claire Perrot, Jérôme Noetinger
ORIGINAL MASTER (stéréo) 2014 - 44khz/16bits
Copyright : Lionel Marchetti/William Pellier/SACEM
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À propos de Mue (la demeure brillante) :
« Avant même que son titre ne s’impose définitivement, Mue (la demeure brillante) débutait par une rencontre : celle de Hervé Bocquin.
Jeune acteur de théâtre, il avait un handicap physique et vocal important et possédait, notamment, ce timbre invraisemblable, naturellement haut et subtilement cendré, qui m’aura tout de suite séduit et dont il savait tirer parti, depuis longtemps, tant dans son travail personnel que théâtral.
Aujourd’hui décédé (une santé trop fragile lui ayant été léguée par l’infernale destinée tranchante) il accepta de travailler avec moi dès notre première rencontre, en toute simplicité et confiance réciproque. Notre collaboration s’averra rapide, efficace et fructueuse.
Au même moment, je demandais à mon ami, écrivain et acteur de théâtre, William Pellier d’écrire, de son côté, un texte destiné à devenir le support d’une œuvre de musique concrète, en s’inspirant particulièrement des magnifiques poèmes Celtes du barde Taliesin (6ème siècle) que j’avais trouvés traduis par Jean Markale dans son ouvrage sur les grands bardes gallois, par ailleurs préfacé par André Breton :
« […/…] Une seconde fois j’ai été créé,/j’ai été saumon bleu,/j’ai été un chien, j’ai été un cerf,/j’ai été chevreuil sur la montagne,/j’ai été un tronc, j’ai été une bêche,/j’ai été une hache dans la main,/[…/] j’ai été muri,/j’ai été mort, j’ai été vivant […/…] »
Je destinais donc le texte original de William Pellier à une lecture à deux voix et me lançais, enregistrements en studio enfin réalisés, dans une fresque de sept tableaux enchaînés, recherchant à m’enfouir dans le grain de la voix comme s’il s’agissait d’un marécage habité, comme s’il s’agissait du lieu même du son comme origine.
Suivant cette idée, j’ai ainsi essentiellement remodelé mes sons avec la technique du crayonné chère à Michel Chion sur un magnétophone Revox PR99 à bande magnétique, au travers duquel toute ma palette se trouvait réunie.
Cette technique (un jeu actif et manuel sur les têtes magnétiques du magnétophone) associée aux nombreux changements de vitesses, lors de l’enregistrement, en tenant compte de la saveur des pleurages et autres scintillements de la bande, tout comme de ses diverses qualités et possibilités de manipulations, joue de l’effacement partiel et hasardeux, offre des rendus sonores flous où se croisent et s’enlacent les sons en strates et reste, aujourd’hui encore, inimitable, car elle est basée sur la récupération d’erreurs consenties, entretenues, fixées et qui offrent, dès lors, une palette d’une richesse insolite et inépuisable.
Cette technique, de même, évoque fortement, pour moi, l’idée d’un dépôt, d’un limon : une manifestation naturelle de l’érosion lente (bien que réalisée ici rapidement et pour une écriture serrée). Elle résonne avec la poétique envisagée dans la composition en entier puisque je désirais m’entretenir avec un être de voix subissant toutes les métamorphoses — idée astucieusement déployée dans le texte, très poétique, de William Pellier et mis en musique comme en une sorte d’étrange bouche à bouche par l’intermédiaire de la technique électroacoustique elle-même.
Née de la voix, essentiellement de la voix, Mue (la demeure brillante) pourrait également être une réponse musicale à mon essai sur le son enregistré intitulé Haut-parleur : voix et miroir… lorsque, bien des années plus tard, j’ai essayé, avec des mots en prose cette fois-ci, de comprendre la relation qui pouvait unir le haut-parleur à la voix, en miroir de l’écoute mammifère et de son langage vocal lorsqu’il représente, peut-être, cette attitude (projetée au dehors) de toute une humanité qui cherche, par son intermédiaire, à se joindre à l’énigme du monde.
N’est-il pas nécessaire, à la surprise d’une rencontre (je pense ici tout particulièrement à Hervé Bocquin) de se laisser posséder jusqu’à ce que la coïncidence ne semble plus nous appartenir en propre ?
S’il existe des pièges, en cette vie, certains sont un parterre de fleurs.
Mue (la demeure brillante) est une composition couleur rouge-sang.
S’il existe une évidence du partage, c’est ici et maintenant, à l’occasion d’un lâcher prise, tant humain qu’artistique, bien éloigné de toute idée de projet. Plus qu’un étonnement voici le renouveau. Un espace autre. Et c’est en toute confiance qu’il s’agira de cheminer en ces territoires afin, à son tour, sincèrement et simplement, d’être autre-chose. »
Lionel Marchetti/2011
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William Pellier est écrivain et dramaturge français.
fr.wikipedia.org/wiki/William_Pellier
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Lionel Marchetti is a French composer of concrete music
an improviser (electronics, various analogic systems with modified speakers, REVOX reel-to-reel recorder…)
as well as a visual-sound artist, a writer and a poet
Whether his music is composed or improvised
the body has an important role (Lionel Marchetti danced with the university company Relyanse between 1986 and 1991)
To define his music, one can borrow Kenneth White’s saying :
« Concrete or abstract ?
I like abstraction where a memory of substance remains, concrete refined on the frontiers of emptiness. »
[free translation]
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NB : for a complete bio & diverses web links
have a look here : Archives radiophoniques…
(below, in my bandcamp discography)
released August 8, 1992